Le trifouilleur culpabilisateur de bonne femme
Amis lecteurs bonjour,
même si nombre d'entre vous connaissent déjà cette anecdote, je m'en vais vous la narrer de nouveau, car, quand même, on peut le dire, ce fut une expérience traumatisante pour moi. Je ne vais pour ainsi dire jamais chez quelque médecin que ce soit, puisque j'ai la chance d'avoir une santé de fer, je dois dire que depuis le test pipi, je suis servie, voire même gratinée aux petits oignons ! Moi qui aurais voulu une grossesse la moins médicalisée possible (excepté la péridurale, là je prends tout de suite, je ne me pose même pas de question !), j'avoue que ça fait beaucoup de choses. Mais bon, mes premières visites avec la sage-femme de l'hôpital se sont plutôt bien déroulées, jusqu'à ce jour.
30 août 2011 (soit 4 mois de grossesse révolus)... Tout commence par une visite prénatale avec ma sage-femme. Petit entretien "comment ça se passe ? Souffrez-vous de ceci, celà ?" A part une rétention d'eau plus que visible sur mes jambes, rien de bien méchant. Arrive le moment fatidique et redouté de la pesée, et là, le verdict est sans appel : +5 kilos par rapport à la précédente visite, 6 semaines plus tôt ! La sage-femme note, mais ne dit rien de particulier. Si ce n'est que je dois voir le docteur F., gynécologue de son état, pour un délicieux instant nommé frottis.
J'entre dans le bureau de ce monsieur, et dès le départ, comme on dit dans ce cas, "je ne le sens pas". Nous procédons cependant au dit-examen et quelques autres vérifications (j'ai ainsi pu voir que, tout de même, trollette se portait à merveille). Retour dans le bureau pour la fin de la visite, et c'est là que tout bascule : "5 kilos ?? Mais à ce stade de grossesse, c'est beaucoup trop, vous imaginez, ça va nous faire du +25 à terme ! Elle va dépasser les 100 kilos ! Madame M., faites-lui une ordonnance pour une consultation diététique !" 1er coup de massue. Et puis c'est quoi ce bonhomme qui ne s'adresse qu'à moitié à moi ? J'ai eu beau lui parler de mon souci de rétention d'eau, et la sage-femme souligner que je faisais déjà de l'oedème, cet âne-là n'a rien voulu savoir. Il continue à fouiner dans mon dossier médical (et je peux vous promettre que j'avais envie de le lui arracher des mains et de me sauver), et là constate : "Elle fait 80 km en voiture tous les jours ?? C'est quoi son métier ?" J'ai en horreur les gens qui ne s'adressent pas directement à vous, mais là apparemment plus à la sage-femme, comme si je n'étais pas capable de dire ce que je fais comme métier... Donc, JE réponds que je suis enseignante, et que, oui, je fais beaucoup de voiture, et que oui, je suis la plupart du temps debout devant mes élèves. De nouveau, il s'adresse à la sage-femme : " Qu'en pensez-vous ? On va faire un arrêt, hein ? C'est plus raisonnable". Il daigne relever son regard vers moi et voit mon air déconfit... " Ah, mais Madame (tiens, il s'adresse à moi quand même cette fois), c'est pour vous, parce que je sais très bien que si je vous laisse aller travailler dans vos conditions habituelles, vous revenez dans trois semaines avec des contractions et là, non seulement ce sera un arrêt, mais vous resterez alitée". Evidemment, dit comme ça, on ne peut qu'acquiescer à l'arrêt de travail immédiat, même si je culpabilise déjà à l'idée de ne pas faire ma rentrée.
La visite se termine enfin, je sors de l'hôpital, remonte dans ma voiture, démarre, et là, tout m'arrive dans la figure : je me mets à pleurer comme une madeleine, le moral brisé. L'appel de mon homme et ses mots de consolation n'y feront rien, ce sera crise de larmes sur crise de larmes pendant 2 jours, combinées à des saignements suite au frottis .
Et puis, le moral reprend le dessus : j'ai fait attention, je suis allée consulter une diététicienne - qui m'a confirmé que mon alimentation était des plus correctes -, j'ai décidé de ne plus me laisser parasiter par ce genre de mésaventure, et la visite suivante s'est déroulée sans aucun problème : normal, il n'y avait que la sage-femme et non cette espèce d'andouille de trifouilleur-culpabilisateur-de-bonne-femme... et mon poids n'avait pas bougé, voire même diminué depuis la dernière fois. Franchement, je ne comprends pas comment on peut prétendre exercer le métier de gynécologue sans un minimum d'empathie, et de psychologie sur les femmes : c'étaient des options facultatives à la fac de médecine, vous croyez ?? Non, parce que, honnêtement, quand on me voit, déjà "naturellement" en surpoids, et qu'on parle avec moi, on se rend tout de même compte que je ne me gave pas de chips devant la télé toute la journée, rassurez-moi ?? Et puis quand on est médecin, depuis un moment dans ce domaine, on est aussi censé voir que quelqu'un ne vit pas forcément bien sa grossesse ?? Parce que sinon, là, je dois dire que c'est jackpot pour ce monsieur là !
Morale de l'histoire : la prochaine fois (s'il y en a une avec lui), à la moindre réflexion, je peux assurément dire, ô lecteur, qu'il se verra envoyer paître dans le bocage normand ! Et je milite pour que des cours de psycho ou de savoir-parler aux gens soient dispensés dans toutes les facultés de médecine !
Pour finir, sur une toute autre note, je poursuis l'éducation musicale in utero de trollette : Concerto en sol de Maurice Ravel. C'est une oeuvre que j'affectionne particulièrement, je ne me lasse pas de la réécouter. Ici, un petit extrait avec la célébrissime Martha Argerich.
Martha Argerich - Yuri Temirkanov - Ravel - Piano concerto in G major